Manufacture d’indiennes à Strasbourg au XVIIIème siècle

Dans le cadre du colloque Venez voyager au coeur de l’Alsace au XVIIème siècle, organisé par l’association Le Siècle des Rohan, j’ai pu présenter une conférence sur les essais de manufactures textiles à Strasbourg. Voici ci-après un extrait de ma présentation faite le dimanche matin 10 avril 2016.

Les documents d’archive nous apprennent qu’entre 1769 et 1777 a existé à Strasbourg une manufacture d’indiennes. Les indiennes sont ces toiles de coton imprimées de couleurs vives que la Compagnie des Indes a fait connaître en Europe à la fin du XVIème siècle. Ces toiles ont tout de suite enchanté le public. Devant la demande grandissante, des manufactures se sont établies en Europe pour fabriquer sur place les textiles jadis importés. Toutefois, cette concurrence aux tissus locaux en laine ou soie ne plaisait pas à tous : la France a prohibé, entre 1686 et 1759, l’usage, l’importation et la fabrication des indiennes.

300px-Indienne,_WesserlingLe projet strasbourgeois de manufacture d’indiennes se présente comme une véritable affaire qui rassemble de nombreux protagonistes :

  • Jean Georges Röderer de Strasbourg et ses associés Jean Vogel de Mulhouse et Ignace Barth de Haguenau,
  • les Strasbourgeois François Antoine Lambrecht et Jean Frédéric Saum,
  • Tobie Hartmann et sa femme Salomé Hirt, originaires de Mulhouse,
  • le marchand strasbourgeois Jean Frédéric Müller et son apprenti Isaac Hirt,
  • Les Quinze et la tribu des marchands de la ville de Strasbourg,
  • Monsieur de Trudaine, Grand intendant des finances du Roi.

La lettre que le préteur royal et le magistrat de Strasbourg envoient à Monsieur de Trudaine en 1775 présente un assez bon résumé de cette histoire. Je vous laisse la lire.

1775, protocole des Quinze, Archives municipales de Strasbourg

1775, protocole des Quinze, Archives municipales de Strasbourg

Lettre d’accompagnement du mémoire

à Mr de Trudaine Conseiller d’Etat et Intendant des finances

Strasbourg ce 28. Janvier 1775.

Monsieur,

Mr. de Blair Intendant de cette Province nous a renvoyé la requête de la nommée Salomé Hirt, que vous lui aviés adressée, Monsieur, pour vous donner sur son contenu les eclaircissements accessoires.

Nous nous proposons d’y satisfaire par le Mémoire qui sera cijoint, ainsi que la requete qui accompagnait votre lettre.

Nous prenons la liberté Monsieur de vous observer quant à la voye par laquelle vôtre lettre nous est parvenue que nous avons été honorés en tout tems immediatement des ordres des Ministres de Sa Majesté pour tous les objets confiés à nôtre administration, et que la manufacture d’Indienne dont il s’agit étant sçise dans la banlieue de la ville, le renvoy de l’affaire qui la concerne ne pouvoit ressortir au Commissaire departi du Roy dans la Province.

Nous sommes d’autant plus jaloux de la conservation de cette prerogative, qu’elle nous met à portée de temoigner en general plus promptement de notre zele pour le service du Roy, et particulièrement à votre égard Monsieur, de vous donner des preuves de la consideration respectueuse avec laquelle nous avons l’honneur d’être, Monsieur, vos très humbles et très obéissants serviteurs, les Preteur et Magistrats de la Chambre des Quinze de la Ville de Strasbourg, signés Le Baron de Wurmser XV. Wencker XV.

Memoire

Salomé Hirt, epouse de Tobie Hartmann cidevant fabriquant d’Indienne à Mülhausen expose dans un Memoire qu’elle a fait présenter au Roy, que son mari, après avoir été entrainé dans la faillite de son frère Directeur de la fabrique de Mousseline à Mez, a eû le malheur en vertu d’une loi municipale de lad° ville, d’en être banni, et que les ressources qu’elle avoit trouvées depuis cet evénement, l’avoient mise à même d’etablir une manufacture de toiles peintes au village de la Ruprechtsau banlieue de Strasbourg, ou elle avoit mis un fond d’environ 50 m. livres, mais qu’elle eprouvoit toutes sortes de vexations de la part des marchands de Strasbourg sous le prétexte qu’on n’admettoit dans la bourgeoisie ni dans le commerce une femme mariée, à moins qu’elle ne fut veuve, et que son mari ayant subi par son bannissement une peine infamante ne pourroit en aucune façon entrer dans le commerce. Elle suplie à cet effet Sa Majesté de la maintenir dans le plein exercice de sa manufacture, et de luy accorder en consequence l’ordre de sa reception dans le Commerce et la bourgeoisie de la ville de Strasbourg.

La manufacture d'indienne se trouvait sur la propriété du Sieur Lambrecht à la Robertsau

La manufacture d’indiennes se trouvait sur la propriété du Sieur Lambrecht à la Robertsau ( Archives municipales de Strasbourg, C III 46.a )

Le récit historique de l’origine de l’établisement dont il est question, de ses progrès et des conditions dans lesquelles il a été demandé et accordé aux premiers entrepreneurs, desquels la supliante prétend avoir fait l’acquisition suffira pour detruire ses assertions et pour faire voir le peu de fondement des plaintes qu’elle a portées jusqu’aux pieds du Trône.

Jean Georges Roederer bourgeois de cette ville s’étant associé en 1769. le nommé Jean Voguel de Mulhausen pour établir une manufacture d’Indienne ou de toiles peintes dans la banlieue de cette ville, il présente sa requête au magistrat de Strasbourg le 23. Xbre de lad. année aux fins d’obtenir lad° permission et une moderation des droits d’entrée et de sortie pour dix années seulement de toutes les toiles blanches dont il pourra avoir besoin pour sa fabrication, avec la clause, qu’il se soumettroit à toutes les précautions que l’on croirait devoir prendre relativement à la sureté des droits de la ville et aux intérets de son commerce.

1769, protocole des Quinze, Archives municipales de Strasbourg

1769, protocole des Quinze, Archives municipales de Strasbourg

L’affaire aiant eté mise en deliberation la Chambre des XV de l’avis du Corps des Marchands accorda par son arreté du 3 mars 1770. au nommé Roederer la permission de l’établissement qu’il avoit sollicité et statua en même tems que les entrepréneurs de cette manufacture ne payeroient pendant dix années consécutives que la dixième partie des droits d’Entrée et de Sortie de toutes les toiles blanches qu’ils feroient venir soit de l’étranger soit de la province, et qu’après avoir eté fabriquées et peintes dans leur manufacture rétourneroient à l’étranger ou dans la province, à charge toutefois de faire marquer et numeroter toutes les piéces lors de l’entrée et de les représenter pour la verification lors de la Sortie de la manufacture, et avec la condition expresse de ne vendre leurs toiles qu’en gros et de s’abstenir de toute vente en detail et par aunage.

Les progrès de cette manufacture n’ont pas eté considerables, à en juger par la consommation en toiles, qui selon les registres de la Douane n’a été à compter du 3. avril 1770. jusqu’au 10. juillet 1771. que de 364 piéces pesant brut 32 ¾ qtx qui ont eté convertiés en Indiennes et mouchoirs.

C’est apparemment ce mauvais succés occasionné par la chereté de la main d’oeuvre et le manque d’ouvriers entendus qui a decouragé les premiers entrepréneurs et les a engagé de chercher à se defaire de leur manufacture.

Tobie Hartmann banni de Mulhausen pour faillite s’etant présenté vers le même tems, et ne demandant pas mieux que de trouver un asile et de se faire un établissement qui repondit à son premier etat, offrit ses services aux Entrepreneurs, et sur l’étalage qu’il leur fit de ses connoissances superieures dans cette partie, ils luy en confièrent la Direction, mais soit ceuxci ne trouvassent pas mieux leur compte qu’auparavant, ou que Tobie Hartmann préfera la qualité d’entrepreneur à celle de Directeur, il fit le 24. Mars 1772 l’acquisition de cette manufacture par Salomé Hirt son Epouse.

Cette acquisition enhardit alors Hartmann de se présenter à la Tribu des marchands de cette ville aux fins d’être recu marchand et bourgeois de la ville, mais n’ayant pû remplir les conditions requises en pareil cas, surtout celle de raporter un certificat de vie et mœurs du magistrat de Mulhausen ses précédents maitres, et les reglemens de la ville n’admettant aucune femme ny dans la bourgeoisie ni dans l’exercice du commerce que du chef de son mari, il changea de batterie et continua la fabrique comme Directeur des anciens entrepreneurs.

La boutique de Jean Frédéric Müller, rue des Orfèvres - dessin de Touchemolin, Cabinet des estampes, Strasbourg

La boutique de Jean Frédéric Müller, rue des Orfèvres – dessin de Touchemolin, Cabinet des estampes, Strasbourg

Cependant le succès qu’il s’étoit promis ne repondant ni à ses besoins ni à ses esperances, il a fait louer sous un nom emprunté une boutique en ville pour tacher luy et son epouse de se recuperer par la vente en detail, malgré la defense expresse portée par le Decret du 3. mars 1770 et s’est servi pour couvrir d’autant mieux cette manœuvre d’une raison simulée de Hirt et Comp. sous laquelle et à l’addresse d’Isaac Hirt aprentif et Jean Frederic Müller marchand de cette ville, ce dernier a reçu pour le compte de la fabrique successivement jusqu’au 5. mars 1774. 1800 à 1900 pièces pour lesquelles les entrepreneurs se sont abstenus de jouir de la moderation qui leur avoit eté accordée, et ont preféré d’acquitter les droits en entier dans l’intention de les soustraire par la à toute verification et de les debiter d’autant plus aisement en detail.

Toutes ces irrégularités ayant forcé la Tribu des marchands à porter plainte devant la chambre des XV, les parties ouïes, il est intervenu le 19. mars 1774 sentence qui en renvoiant les entrepreneurs de la manufacture à la teneur du privilége qui leur a eté accordé le 3. mars 1770. leur a fait iteratives defenses sous peine de 100. Ecus d’amende de vendre en detail, soit par eux-memes, soit par Hartmann et son Epouse, ou par le Sr Muller leur commissionnaire, et de s’abstenir sous la même peine de la signature de Hirt et Comp. comme etant simulée et contraire au reglement de la ville, qui porte, qu’une raison et signature de commerce pour être valable doit être declarée et portée dans les registres du Corps des marchands de cette ville.

D’après cet exposé on ne voit pas quel peut être l’objet des reclamations de Tobie Hartmann et de Salomé Hirt son epouse, on ne les a point genés dans l’exploitation de leur manufacture, on n’a point refusé de les maintenir dans l’exercice du privilège qui leur a eté accordé ; bien au contraire qu’ils se tiennent aux termes de ce privilège, qu’ils fassent valoir leur industrie et leurs connoissances dans la fabrication d’Indiennes, et ils trouveront toujours les Magistrats de la ville de Strasbourg disposés à leur donner toutes les facilités raisonnables et à les garantir contre la jalousie de leurs confrères.

Registre du Corps des Marchands, Archives municipales de Strasbourg

Registre du Corps des Marchands, Archives municipales de Strasbourg

Mais si à l’abri de ce privilège ils croient pouvoir faire un commerce de detail le devoir des mêmes Magistrats exige de les en empecher, parce que ce seroit renverser tout ordre dans le Commerce, si le manufacturier vouloit être en même tems marchand, ce seroit enfreindre les reglemens les plus sages, qui n’accordent point indistinctement à chacun la bourgeoisie dans cette ville et la faculté d’y faire le commerce, et ce seroit enfin les traiter plus favorablement que leurs auteurs, bourgeois de cette ville, auxquels on avait formellement interdit le detail.

Au reste le Magistrat de Strasbourg cherchera toujours à concilier ses anciens Statuts avec la faveur que peut meriter tout nouvel établissement, mais il n’osera s’écarter de ses propres reglemens qu’avec circonspection, et qu’autant que l’utilité d’un pareil etablissement sera bien reconnue, et que des concessions de cette nature ne porteront aucun préjudice à ses propres citoyens, aux droits desquels son etat l’oblige de veiller.

La lettre se trouve dans le protocole des Quinze, voir ci-dessus la légende de l’illustration qui la représente. Pour en savoir plus :

 

Teindre avec les myrtilles et autres plantes à anthocyanes

Pour moi, les myrtilles, ça se mange en tarte, et quel délice.

Pour moi, les myrtilles, c’est ma tante Lucie qui les cueillait dans les bois en Normandie, parfois. Il n’y en avait pas beaucoup.

Pour moi, les myrtilles, ce sont des souvenirs liés aux débuts de ma vie avec mon chéri, ici en Alsace. Tarte dégustée les yeux dans les yeux, promenade à vélo pour aller en cueillir dans le val de Villé.

planche botanique tirée de Wikipedia

planche botanique tirée de Wikipedia

Pour moi, les myrtilles, c’est donc toute une histoire. Sans doute fallait-il y ajouter un chapitre : dimanche prochain 21 juillet 2013, je ferai des expériences de teinture à la myrtille, dans le cadre de la fête de la myrtille de Dambach-Neunhoffen, dans le nord de l’Alsace. En effet, les Mediomatrici, troupe de reconstitution protohistorique dont je suis la teinturière, y sont invités. Il se trouve même que mon nom de Gauloise, Glasina, signifie la myrtille, la petite bleue. Normal, pour celle qui connaît les plantes et les couleurs, non ?

Il semble bien que depuis longtemps déjà, les humains utilisent ces baies pour teindre leurs textiles. Pline l’ancien (1er siècle après JC) , rapporte dans son Histoire naturelle que, chez les Gaulois, les baies de myrtilles servent  à teindre les vêtements des esclaves (livre XVI, XXXI).

C’est surtout la peau des myrtilles qui contient les anthocyanes, les colorants de la gamme des bleus et violets qui vont donner la couleur à nos textiles. Dimanche, j’expérimenterai devant le public. J’espère qu’il y aura des gens pour faire de la gelée et me donner ce qui sort de leur passoire. Car tout de même, les myrtilles, je préfère qu’elles servent à l’alimentation ou à la médecine qu’à la coloration des laines. D’autant qu’il y a d’autres sources d’anthocyanes dans la nature : fruits de la ronce, du sureau, du merisier, ou dans les parcs fruits du mûrier noir. Au XXIème siècle, à échelle industrielle, c’est surtout le marc de raisin qu’on utilise pour les obtenir.

coton teint aux cerises noires

coton teint aux cerises noires

Je crois savoir que la teinture au bouillon, dans la marmite, avec les myrtilles, ne me donnera pas forcément une couleur qui tient à la lumière et au lavage. Il vaudrait mieux faire fermenter les baies en laissant faire le temps. C’est ce que je déduis de mon expérience et de la lecture de recettes anciennes. Alors à la fête de la myrtille, je vous montrerai le résultat obtenu par fermentation avec différentes baies locales en septembre 2008. Il se trouve que je n’ai pas essayé la myrtille, parce que lorsqu’elle croise mon chemin elle se retrouve… dans mon estomac !

Fête médiévale à Châtenois le 9 juin

Le programme de l’émission 2013 de cette fête bien connue en Alsace centrale et au-delà est ici.

Je vous y montrerai la teinture à la garance, cette plante dont la racine a une longue histoire en teinture. Des rouges, des roses et des orangés naîtront sous vos yeux. Je vous ferai découvrir les parentes de la garance, nos rubiacées locales que sont le gaillet et l’aspérule.

Et je ne manquerai pas de vous raconter quelques histoires de maîtres teinturiers en rouge, il y en a de savoureuses !

Rendez-vous donc le dimanche 9 juin dans le jardin des plantes textiles et tinctoriales de Châtenois.

 

Couleurs de printemps

Quelle est donc la couleur du printemps ?

VERT me direz-vous, en pensant aux petites plantules qui pointent le bout de leurs cotylédons, ces deux fausses feuilles qui apparaissent en premier lorsqu’une graine germe.

Je ne suis pas de votre avis, regardez plutôt :

premières feuilles de rosier

Les premières feuilles d’un rosier

et encore :

pousses de pivoine

Les pousses d’une de mes pivoines

Alors moi, je dis que la couleur du printemps, c’est le ROUGE !

C’est pourquoi la dernière semaine de mars, j’ai choisi d’expérimenter la teinture avec des racines de garance séchées (rubia tinctorium). J’ai préparé ma laine en la mordançant avec de l’alun de potasse, puis j’ai fait différentes expériences en m’inspirant d’un message de Jenny Dean, daté 12 février 2012 . Et voilà le résultat :

Rouges garance, Sélestat, mars 2013

Rouges garance

Il fallait bien mettre de la couleur dans la grisaille de cette fin mars, non ?

Ateliers « Fais-le toi-même » sur le Campus de Strasbourg

Dans le cadre de la semaine de l’environnement, sur le parvis de la fac de droit, tout un ensemble d’ateliers le jeudi 21 mars à partir de midi.

Venez donc nous voir et mettre la main à la pâte. J’apporte mes marmites, mes plantes et mes bassines, pour donner de nouvelles vies à des draps fatigués ou des t-shirts défraîchis. En avant les couleurs !

Tout le programme ici.

A tout bientôt

 

Dans la marmite, ça bouillonne

Vous connaissez la comptine de René de Obaldia ?

Dans la marmite ça ronronne
Ça n’arrête pas de ronronner.
Encore plus fort que papa
Quand il dort le nez bouché.
Ça ronronne dans la marmite, ça ronronne !

Ceux qui ne savent pas ce qu’il y a dedans
Font des yeux ronds comme des pommes
Mais moi je sais pourquoi :

C’est pas du lapin, c’est du chat.

Dans notre famille, c’est un classique. Eh bien nous avons fait une variante, hier, à la fête des remparts de Châtenois, au pied du clocher de l’église. Voilà ce que cela donnait :

Dans la marmite ça bouillonne
Ça n’arrête pas de bouillonner.
Encore plus fort que papa
Quand il est vraiment fâché.
Ça bouillonne dans la marmite, ça bouillonne !

Ceux qui ne savent pas ce qu’il y a dedans
Font des yeux ronds comme des pommes
Mais moi je sais pourquoi :

C’est pas d’la soupe, c’est d’la teinture.

C’est pas d’la betterave, c’est du brésil.

Rendez-vous au jardin

C’était donc ce week-end à Châtenois, dans la bonne humeur et avec tous les temps : nous avons bronzé samedi et nous sommes emmitouflés dimanche. Quelques photos vaudront mieux qu’un long discours.

Voici une vue générale du stand de Petite épeire, la teinturière médiévale pour l’occasion.

le stand au fond du jardin

Et le jardin qui l’accueillait, avec ses plessis, entrelacements de châtaignier qui délimitent les petits espaces de culture  :

Il est niché au pied des remparts, à deux pas de l’église fortifiée, dont on voit le clocher en haut à droite.Les visiteurs pouvaient aller des carrés où poussent les plantes tinctoriales aux écheveaux teints par leurs colorants. Sagement alignés, les écheveaux teints à la tanaisie, à l’oignon, à la garance ou au gaillet :Bien sûr il y avait aussi un peu de lecture pour les grands curieux :Avec le public, nous avons expérimenté les modificateurs. Le petit bout de soie teint au bois du Brésil passe du rouge au violet, quand on le trempe dans un bain de cristaux de soude, on dirait de la magie. Les petits bouts de tissu sèchent au soleil – ce qui n’est pas recommandé, d’habitude on sèche à l’ombre. Mais lors d’une manifestation publique, il faut bien transgresser les règles !Et raconter des histoires, évidemment :Dimanche prochain, le 10 juin, le jardin sera de nouveau animé, à l’occasion de la fête des remparts. Quant à moi, Petite épeire la teinturière, je serai installée avec les artisans, un peu plus loin, au pied de l’église.

Un grand merci à l’équipe des animateurs du Castel qui entretient le jardin et a bien voulu poser pour la postérité !

Rouges

Les 2 et 3 juin prochains je serai à Châtenois, dans le Bas-Rhin, où l’on inaugurera le Jardin du Tisserand, un des onze jardins médiévaux d’Alsace centrale nichés autour du château du Haut-Koenigsbourg. Pour l’occasion, j’ai choisi de me concentrer sur la couleur rouge.

Le rouge, depuis longtemps, c’est LA couleur, celle des puissants. Les Romains portaient des toges pourpre dont la couleur était obtenue à partir d’un mollusque du même nom. Au Moyen-Âge, il y a deux grandes sources de rouge autorisées : la garance des teinturiers, une plante cultivée originaire de l’Asie occidentale et centrale, et les femelles de certaines cochenilles, les meilleures étant le kermès des teinturiers, importé d’Orient lui-aussi.

Les draps de laine teints au kermès, c’était le nec plus ultra, réservé aux plus riches. Dans la langue française d’aujourd’hui, les mots cramoisi et carmin dérivent du nom de cet insecte, source de la couleur… un nom qui nous vient de la racine indo-européenne °kwrmi, qui désigne la larve, le ver, bref aujourd’hui les insectes. Le mot persan kirmiz désignait la cochenille d’Arménie, et les Arabes ont repris ce mot pour nommer l’insecte méditerranéen donnant le rouge écarlate, le kermès des teinturiers.

Quant à la garance des teinturiers, elle a des parentes qui poussent au pied du château du Haut-Koenigsbourg : l’aspérule odorante, qui parfume agréablement le vin blanc, demandez aux habitants de Dambach-la-Ville, et le gaillet commun qui est en fleur lui aussi en ce moment. Toutes deux teignent aussi en rouge, venez le vérifier à Châtenois début juin !

3 000 ans de couleurs, un symposium international à Vienne en Autriche

Du 21 au 23 mars prochains aura lieu à Vienne le second symposium sur les textiles de Hallstatt. Il réunira archéologues internationaux et artistes ou artisans contemporains dans les domaines de la teinture et des textiles. Vous pouvez lire le programme ici, et revenir dans quelques semaines dans ce jardin pour y lire mon compte-rendu, puisque j’y serai.

Ateliers de teinture végétale

Où donc ? à l’association Mimir, 18 rue Prechter à Strasbourg. Une petite rue derrière les bains municipaux.

Quand donc ? chaque premier et troisième jeudi du mois. L’atelier commence à 18 h et dure environ 3 heures.

Avec qui ? moi la Petite épeire qui ai pris une longueur d’avance sur les autres et ai plaisir à partager ce que je sais, et les copines de l’atelier couture de chez Mimir qui a lieu les autres jeudis soir.

Pour quoi faire ? pratiquer dans la bonne humeur l’art de la teinture végétale, découvrir les secrets des plantes et des marmites, au fil des ateliers et des saisons.

Comment faire ? Venir nous voir aux jours et heures convenus. L’atelier est à prix libre… et plus on est de fous plus c’est riche. Au plaisir de vous voir un de ces jeudis soir !