Teindre avec les myrtilles et autres plantes à anthocyanes

Pour moi, les myrtilles, ça se mange en tarte, et quel délice.

Pour moi, les myrtilles, c’est ma tante Lucie qui les cueillait dans les bois en Normandie, parfois. Il n’y en avait pas beaucoup.

Pour moi, les myrtilles, ce sont des souvenirs liés aux débuts de ma vie avec mon chéri, ici en Alsace. Tarte dégustée les yeux dans les yeux, promenade à vélo pour aller en cueillir dans le val de Villé.

planche botanique tirée de Wikipedia

planche botanique tirée de Wikipedia

Pour moi, les myrtilles, c’est donc toute une histoire. Sans doute fallait-il y ajouter un chapitre : dimanche prochain 21 juillet 2013, je ferai des expériences de teinture à la myrtille, dans le cadre de la fête de la myrtille de Dambach-Neunhoffen, dans le nord de l’Alsace. En effet, les Mediomatrici, troupe de reconstitution protohistorique dont je suis la teinturière, y sont invités. Il se trouve même que mon nom de Gauloise, Glasina, signifie la myrtille, la petite bleue. Normal, pour celle qui connaît les plantes et les couleurs, non ?

Il semble bien que depuis longtemps déjà, les humains utilisent ces baies pour teindre leurs textiles. Pline l’ancien (1er siècle après JC) , rapporte dans son Histoire naturelle que, chez les Gaulois, les baies de myrtilles servent  à teindre les vêtements des esclaves (livre XVI, XXXI).

C’est surtout la peau des myrtilles qui contient les anthocyanes, les colorants de la gamme des bleus et violets qui vont donner la couleur à nos textiles. Dimanche, j’expérimenterai devant le public. J’espère qu’il y aura des gens pour faire de la gelée et me donner ce qui sort de leur passoire. Car tout de même, les myrtilles, je préfère qu’elles servent à l’alimentation ou à la médecine qu’à la coloration des laines. D’autant qu’il y a d’autres sources d’anthocyanes dans la nature : fruits de la ronce, du sureau, du merisier, ou dans les parcs fruits du mûrier noir. Au XXIème siècle, à échelle industrielle, c’est surtout le marc de raisin qu’on utilise pour les obtenir.

coton teint aux cerises noires

coton teint aux cerises noires

Je crois savoir que la teinture au bouillon, dans la marmite, avec les myrtilles, ne me donnera pas forcément une couleur qui tient à la lumière et au lavage. Il vaudrait mieux faire fermenter les baies en laissant faire le temps. C’est ce que je déduis de mon expérience et de la lecture de recettes anciennes. Alors à la fête de la myrtille, je vous montrerai le résultat obtenu par fermentation avec différentes baies locales en septembre 2008. Il se trouve que je n’ai pas essayé la myrtille, parce que lorsqu’elle croise mon chemin elle se retrouve… dans mon estomac !

Mettez les fleurs en conserve !

Car c’est la saison des limonades de fleurs et des sirops gorgés de pollen. Ici dans la plaine d’Alsace, les acacias sont presque fanés, les sureaux sont délicieusement parfumés, le tilleul se prépare et mes roses de Damas commencent à embaumer.

Pour les limonades c’est facile : remplir un bocal de verre avec les fleurs choisies, après les avoir  laissées un peu étalées dehors pour permettre aux insectes qui s’y cachaient de s’échapper. Ajouter de l’eau, quelques rondelles de citron non traité et du sucre en poudre. Fermer le bocal, et attendre environ une journée, ça c’est selon les goûts. Ma famille apprécie la limonade d’acacia, mais je sais qu’il y a des amateurs de limonade de sureau, et qu’on peut traiter ainsi toutes les fleurs.

Mon grand favori, c’est tout de même le sirop concentré de fleurs de sureau. Il faut vraiment tasser tout plein de sommités fleuries dans un bocal en verre, recouvrir d’eau – le mieux est qu’aucune fleur ne surnage, pour ne pas avoir une vilaine couleur noire – et laisser 24 h au soleil. Ne pas oublier le flacon à ce stade, cela nous est arrivé l’an dernier et une fermentation avait commencé, dont pour cette recette on ne veut absolument pas. Quand on estime que les fleurs ont bien donné leurs arômes à l’eau, filtrer, ajouter du sucre et de l’acide citrique (respectivement 1,25 kg et 20 g par litre de jus), et laisser mûrir trois jours de plus au soleil, dans des bouteilles bien hermétiquement fermées. Vous verrez, pour aromatiser une bière blonde, c’est un délice.

Mon livre de chevet pour la cuisine des fleurs, c’est le beau livre de Jelena De Belder et Elisabeth de Lestrieux, La saveur des fleurs, paru en 1991 chez Duculot. Je sais bien que depuis, d’autres livres sont venus sur le marché, mais je reste fidèle à celui-là.

Et pour piocher d’autres recettes, ou aller partager les vôtres, vous voudrez peut-être faire un tour sur le forum Manger des mauvaises herbes : je trouve qu’on y est en bonne compagnie !

Je vous laisse : mes bocaux m’appellent.